Valérie Belin Centre Pompidou

MUSEES - FONDATIONS - INSTITUTIONS

VALÉRIE BELIN
LES IMAGES INTRANQUILLES
24 JUIN - 14 SEPTEMBRE 2015
GALERIE D’ART GRAPHIQUE, NIVEAU 4
Centre Pompidou

75191 Paris cedex 04
téléphone
00 33 (0)1 44 78 12 33
www.centrepompidou.fr

D’où provient ce sentiment d’inquiétante étrangeté que produisent les photographies de Valérie Belin ? De la carnation vivante de ses mannequins de vitrine, de la fixité du visage de ces femmes rencontrées dans la rue ? De l’aspect organique de ces carcasses de voitures, du caractère sculptural de ces boeufs écorchés ? Est-ce un sosie ou une statue de cire ?


Le Centre Pompidou consacre, pour la première fois, une exposition à l’oeuvre de Valérie Belin du 24 juin au 14 septembre. Constituée d’une trentaine d’oeuvres, l’exposition est organisée autour de la toute dernière série de Valérie Belin, « Super Models ». Cette nouvelle proposition renoue avec la thématique du mannequin qui est au coeur du travail de l’artiste, en lien avec des oeuvres antérieures provenant de collections publiques ou privées.

VALERIE BELIN CENTRE POMPIDOU

Valérie Belin
Isthar (série Super Models), 2015
Tirage pigmentaire,
Courtesy Galerie Nathalie Obadia, Paris/Bruxelles
© Adagp, Paris 2015 

 Par le traitement de la lumière, des contrastes, les proportions des tirages et autres paramètres savamment orchestrés, Valérie Belin joue de l’incertitude. Devant ses images, il est souvent difficile de dire si ce que l’on regarde est doué de vie ou inanimé, réel ou virtuel, naturel ou artificiel.

Des détails subtils qui interrompent la continuité quotidienne, ramenant au concept d’inquiétante étrangeté de Sigmund Freud qui la définissait justement comme « Le fait de douter qu’une créature apparemment vivante soit animée, et à l’inverse l’idée qu’une créature sans vie pourrait bien être animée, en se référant à l’impression produite par les mannequins de cire, les poupées ou les automates réalisés avec art » [ Sigmund Freud, « L’Inquiétante étrangeté », 1919 ].

C’est cela précisément qui confère aux oeuvres de Valérie Belin une singulière puissance et le choix des oeuvres ici réunies, « Michael Jackson », « Black Women I », « Lido », « Meats», «Engines», …, illustre cet aspect spécifique de son travail.

BIOGRAPHIE DE L’ARTISTE

Valérie Belin est née en 1964 à Boulogne-Billancourt et vit et travaille à Paris.
Depuis 2013, elle est représentée par la Galerie Nathalie Obadia Paris / Bruxelles.
Valérie Belin suit une formation artistique à l’école nationale des beaux-arts de Bourges de 1983 à 1988 ; elle poursuit ensuite des études en philosophie de l’art à l’université Panthéon-Sorbonne à Paris, où elle obtient un diplôme d’études approfondies en 1989.
Dès ses premières années d’études, Valérie Belin s’oriente vers une pratique de la photographie marquée par la prise en compte des propriétés intrinsèques de ce medium, qui la conduit à s’engager dans un approfondissement de son potentiel esthétique ; elle compare sa démarche à celle de certains peintres et artistes minimalistes américains, comme Robert Morris ou Robert Ryman. Ses premiers travaux sont des photographies de sources lumineuses, qui présentent l’aspect de radiographies ou de pures empreintes laissées par la lumière.

En 1994, Valérie Belin expose pour la première fois son travail à Paris ; elle y présente une série de photographies en noir et blanc d’objets en cristal. Jusqu’à la fin des années 1990, l’artiste affirme son style au travers de cet exercice de la série, faisant ainsi émerger une « vérité » de l’objet, en le dépouillant de son arrière-plan anecdotique et d’un expressionnisme qui pourrait être lié à son individualité.
En 1999, l’Union centrale des arts décoratifs expose la série des Bodybuilders, qui marque l’apparition de la figure humaine dans l’iconographie de l’artiste. Les corps cabossés et métalliques des bodybuilders témoignent d’une ambivalence toujours à l’oeuvre dans le travail de Valérie Belin : les choses et les êtres y sont photographiés comme « au-delà d’eux-mêmes », pour leur puissance à convertir leur image en une forme d’évocation de l’absence.
Image
 Valérie Belin
Mannequins (Sans titre), 2003
Épreuve gélatino-argentique
© Centre Pompidou, MNAM-CCI/G.Meguerditchian /Dist. RMN-GP
© Adagp, Paris 2015

Entre 2000 et 2003, Valérie Belin, s’engage dans une recherche qui s’attachera aux questions existentielles et identitaires de l’être, et réalise des séries de portraits en noir et blanc, de taille monumentale : notamment, la série des Transsexuels, qui met en exergue le brouillage des frontières de l’identité, liées à la question du genre – et la série des Femmes noires, dont les visages, proches d’une sculpture, questionnent le filtre culturel et ses projections. L’aboutissement de ce travail sur la question du portrait est accompli par la série des Mannequins de vitrine, qui, paradoxalement, paraissent plus animés d’émotions que les êtres réels.

À partir de 2006, d’importants musées américains et français font l’acquisition de ses oeuvres :
le Museum of Modern Art de New York, le San Francisco Museum of Modern Art, le Musée national d’art moderne à Paris, le Musée d’art moderne de la ville de Paris, le Palais Galliera à Paris.
L’année 2006 sera aussi marquée par l’apparition de la couleur dans le travail de Valérie Belin, introduisant ainsi une nouvelle ambiguïté sur le statut du réel et du virtuel. Le medium photographique utilisé s’enrichit de technologie, intervenant dans le façonnage de l’être. Les portraits en couleur de 2006 sont marqués par l’aspect quasi technologique de leur beauté, évoquant en cela l’esthétique de l’avatar.
En 2007, une exposition rétrospective est coproduite par trois grands musées dédiés à la photographie : la fondation Huis Marseille à Amsterdam, la Maison européenne de la photographie à Paris et le musée de l’Élysée à Lausanne. La seconde monographie de l’artiste est publiée par l’éditeur allemand Steidl.
Dans les oeuvres qui suivent, l’artiste se détache d’une conception « indicielle » de la photographie et son style évolue vers une forme de réalisme plus « magique ». Valérie Belin situe désormais son objet au sein des évolutions de son époque : ses nouvelles oeuvres montrent une nature hybride qui place le sujet entre l’organique et le sublime.

En 2008, Valérie Belin expose ses oeuvres au Norton Museum of Art de Palm Beach en Floride, aux côtés de celles de Bill Viola et Hiroshi Sugimoto. En 2009, Le Peabody Essex Museum organise sa première exposition personnelle dans un musée Américain. En juillet 2009, elle est nommée au grade de chevalier dans l’ordre des Arts et des Lettres.

La fin des années 2000, ouvre la voie à de nouvelles investigations. La série des Vintage Cars, de 2008, constitue d’une certaine manière le « contrepoint » de la série des voitures accidentées, réalisée dix ans auparavant : à l’opposé d’un supposé « réalisme » à l’oeuvre dans les séries plus anciennes, l’artiste procède ici à la « déréalisation » ou à la « virtualisation » de son sujet, par tous les artifices que permet aujourd’hui le médium, pour atteindre une certaine forme de paroxysme de la représentation.
Le travail de Valérie Belin ne cesse alors d’évoluer, toujours en phase avec les évolutions du médium photographique qu’elle utilise : là où il n’était auparavant question que d’analogie, il est aujourd’hui beaucoup plus question de calcul, d’intention, de manipulation, d’information, d’impression…
C’est ainsi que l’artiste va mettre à l’épreuve, dans la plus pure tradition baroque, et souvent avec bonheur, jubilation et fantaisie, tous les artifices qui s’offrent aujourd’hui à elle, par le traitement des tons et des couleurs, la solarisation, la superposition, la saturation, l’accumulation. De cette mise en oeuvre, il résultera les séries Crowned Heads (2009), Black Eyed Susan (2010-2013), Stage Sets (2011), Brides (2012), Bob (2012), Interiors (2002) et Still life (2014).

Au-delà de la photographie, Valérie Belin s’investit aussi dans d’autres champs de l’expression artistique – comme vidéographie ou la scénographie. En 2011, elle présente une oeuvre vidéo dans le cadre d’une installation à Rio de Janeiro ; elle y reprend chacune des photographies de sa série Black Eyed Susan sous la forme d’une « image fixe » à laquelle elle superpose un motif vidéographique animé et qu’elle accompagne d’une musique électronique répétitive. Ces motifs perturbants, formant une sorte de « bruit de fond électronique », se surajoutent au motif original, comme pour brouiller plus encore les pistes de lecture, à la manière d’un message publicitaire. En 2013, elle conçoit une live performance pour le Centre Pompidou ; elle y reprend le sujet de l’une de ses séries photographiques précédentes (Michael Jackson, 2003), qu’elle « ressuscite » par le jeu de la mise en scène en autant de tableaux vivants équivalents, comme si l’on pouvait passer sans cesse du vivant au musée de cire, et du musée de cire au vivant.

En 2010, l’une de ses oeuvres (Black Eyed Susan) intègre la Kunsthaus Zürich Collection. En 2013, elle expose à la galerie Edwynn Houk à New York, et le Multimedia Art Museum de Moscou lui consacre une exposition rétrospective. En 2014, elle expose ses dernières oeuvres (Still Life) à la galerie Nathalie Obadia à Bruxelles et l’ensemble de ses séries récentes à la Fondation DHC ART à Montréal.

Image
 Valérie Belin
Isthar (série Super Models), 2015
Tirage pigmentaire,
Courtesy Galerie Nathalie Obadia, Paris/Bruxelles
© Adagp, Paris 2015

 TROIS QUESTIONS À VALÉRIE BELIN

Propos recueillis par Clément Chéroux, commissaire de l’exposition, conservateur au musée national d’art moderne
Publié dans le Code Couleur N°22, mai - août 2015
Clément Chéroux - Comment et pourquoi avoir choisi la photographie pour construire votre oeuvre ?


Valérie Belin - J’ai commencé à faire mes premières photographies vers 1984. Cette époque était encore très marquée par ce qu’on appelait l’art « conceptuel ». L’art minimal américain a aussi fait partie de mes premières influences. Pourquoi la photographie ? Peut-être pour cette faculté d’être en prise directe avec le réel au travers d’une expérience, et cette facilité à obtenir immédiatement un résultat visible.
Je me suis alors intéressée aux « choses », et à leur manifestation au travers de ce processus d’objectivisation qu’est la photographie. Il m’est apparu qu’il existait une sorte de symbiose entre l’essence purement lumineuse des objets que je photographiais et la nature du medium photographique.
La photographie s’est imposée comme un moyen d’exister. La « caméra » est devenue l’outil que j’ai utilisé, comme la machine à écrire est celui qu’utilisent les écrivains. C’est devenu un système, et ma façon de travailler.

CC - Une nouvelle série - présentée pour la première fois dans cette exposition - revient au thème
des mannequins. Pourquoi cette fascination ?


VB - J’ai réalisé une première série de photographies de mannequins de vitrine en 2003, après avoir photographié de véritables « modèles » en 2001. J’ai fait ces « portraits » avec le même souci de réalisme, comme pour atteindre une sorte d’équivalence. Dans mes photographies, les mannequins de cire sont aussi vivants que les modèles ; c’est ce paradoxe de la représentation que j’ai cherché à atteindre.
Le mannequin est un être parfait, idéal, mais aussi ambigu ; il provoque un trouble de la représentation. C’est une thématique assez récurrente dans mon travail ; je photographie les visages comme des masques. Je suis fascinée par la notion d’animé et d’inanimé. J’ai repris cette thématique dans ma dernière série de photographies, mais en utilisant d’autres artifices de la représentation, par l’usage d’un motif ou d’un décor, afin d’introduire un effet de plus grande « humanité ».

CC - Comment expliquez-vous l’effet d’inquiétante étrangeté que produisent souvent vos images ?

VB - Cette notion « d’inquiétante étrangeté », qui est à l’oeuvre dans mes photographies, est un concept très présent dans la littérature romantique allemande du 19ème siècle ; c’est aussi devenu un concept freudien. Ce sentiment irrationnel peut survenir, par exemple, par le doute suscité « soit par un objet apparemment animé dont on se demande s’il s’agit réellement d’un être vivant, soit par un objet sans vie dont on se demande s’il ne pourrait pas s’animer ». C’est ce paradoxe que je mets à l’oeuvre. Ce malaise survient dans ce moment de doute où l’on pense apercevoir un autre que soi-même dans le reflet de la vitre ou du miroir. La photographie peut être ce miroir tendu dans lequel on ne se reconnaît pas.

 

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Patrick Reynolds
 

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